La question de la prostitution – deuxième partie

Ce deuxième article prolonge notre analyse de la question de la prostitution en s’intéressant à sa réalité. Après la présentation plus fondamentale de ce que la prostitution implique vis-à-vis de la grille d’analyse marxiste du travail, il convient de présenter comment la prostitution se matérialise dans nos sociétés occidentales et développées en particulier, notamment dans les pays où elle se trouve légalisée et règlementée. Il apparaît d’emblée que la prostitution subit les vicissitudes du capitalisme et même qu’elle les renforce sur certains aspects.

La prostitution prend dans le discours néo-réglementariste la forme d’un travail. Cependant, comme nous avons cherché à le démontrer dans la première partie de notre étude, la prostitution ne peut pas être considérée comme un travail si l’on se réclame du marxisme et de son appareil conceptuel. Si elle n’est pas un travail, alors qu’est-ce que la prostitution ? La prostitution est d’abord une exploitation économique : dans le mode de production capitaliste, elle représente un immense marché à conquérir. En 2016, on estimait à 186 milliards de dollars états-uniens le chiffre d’affaires annuel issu de la prostitution 1. Par sa tendance à considérer la valeur d’échange de la marchandise comme la finalité de la production au détriment de la valeur d’usage (qui ne devient qu’un simple vecteur de la valeur d’échange), le capitalisme en vient à élargir le domaine du marchand et de la valeur d’échange à des pans entiers de nos vies qui gagneraient pourtant à ne pas être réduits à l’état de marchandises. La privatisation et la marchandisation du vivant (comme la terre et l’eau) découlent de cette tendance du mode de production capitaliste à la marchandisation du monde humain. C’est dans cette perspective que s’ancre la prostitution, comme procès de marchandisation du corps humain et de la sexualité humaine, qui certes, n’est pas propre au capitalisme (la prostitution existait avant l’émergence du capitalisme), mais qui se trouve renforcée par ce mode de production et ses logiques économiques.

Le sexe dans une économie de marché est réifié, c’est-à-dire perçu comme une marchandise appropriable par la personne prostituée : dans le discours néo-réglementariste, les « travailleuses du sexe » vendraient du sexe. Le sexe se trouve là, entre une vendeuse et un client, comme s’il s’agissait d’une chose complètement indépendante produite dans le cadre d’un « service sexuel ».

Vendre du sexe dans le cadre d’un service sexuel n’est qu’une abstraction qui a pour objectif de dissimuler les rapports concrets de violence et de domination patriarcale qui sous-tendent la prostitution.

Dans la réalité, loin des abstractions mystifiantes, le sexe est indissociable d’un corps sans lequel l’acte sexuel n’aurait pas lieu. Le corps, et plus précisément les parties génitales, sont donc réduites à l’état de marchandises. Elles sont vendues sur le marché du sexe, le client choisit la prostituée en fonction de sa pure apparence comme s’il choisissait n’importe quelle marchandise dans un supermarché. Mais si le corps devient une marchandise, alors quelle place reste-t-il pour l’individu ? C’est là que la force idéologique du discours néo-réglementariste fait des miracles : l’individu se retrouve séparé de son propre corps.

Il y aurait le Moi, sujet actif qui choisit de vendre quelque chose, et le produit, c’est-à-dire ses organes sexuels dans le cadre d’un « service sexuel ». La prostituée est donc considérée comme une personne qui se compose de deux parties : la partie qui est vendue (le corps) et celle qui vend (le Moi), d’un être et d’une marchandise 2. Cette idée que je ne suis pas mon corps mais que mon corps est à moi, qu’il m’appartient, est une perversion libérale du slogan « mon corps, mon choix » : l’indisponibilité pour autrui de mon corps est de plus en plus souvent mélangée avec une attitude d’appropriation personnelle du corps. Si je suis propriétaire de mon corps, je peux donc le vendre, et personne n’a rien à me dire car il s’agit de ma liberté. Après la propriété entre en scène une autre caractéristique du discours libéral : la sacro-sainte liberté. Peu importe que 91 % des personnes prostituées en France soient étrangères 3, que 80 % à 95 % des personnes prostituées françaises aient des antécédents sexuels troublants (viols, incestes, etc.)4, que l’âge moyen d’entrée dans la prostitution dans le monde soit de 13 à 14 ans 5 et de 15 à 17 ans en France 6. Ce qui compte pour les néo-réglementaristes, c’est que cette illusion de liberté s’installe et masque les rapports de domination inhérents à cette activité.

Le rôle de ce discours est de normaliser la prostitution pour permettre aux capitaux de conquérir cet immense marché économique. Derrière les grands discours sur « la liberté des travailleuses du sexe à exercer leur métier » se cachent les intérêts des capitalistes qui n’attendent que la réglementation et la normalisation de cette activité pour investir. N’oublions pas que le STRASS (Syndicat du Travail Sexuel) qui prétend défendre les droits des prostituées et qui se bat pour la réglementation de la prostitution se bat également pour la dépénalisation des clients et des proxénètes, ces derniers étant considérés comme des « travailleurs du sexe » au même titre que les prostituées 7. Ainsi, le STRASS se rapproche davantage du lobby réglementariste et de la corporation que du syndicat. Employer le nom de syndicat s’inscrit dans ce combat idéologique de normalisation de la prostitution dans la société.

Comme le démontre l’exemple du STRASS, la lutte pour la réglementation au nom de l’amélioration des « conditions de travail » des prostituées est une chimère qui sert en réalité les intérêts des capitalistes.

Réglementer la prostitution dans un mode de production capitaliste entraîne indéniablement ce que Marx appelle une subsomption du travail par le capital8, ou en l’occurrence une subsomption de la prostitution par le capital. Cette subsomption prend deux formes : la subsomption formelle, qui est l’utilisation du procès de travail par le capitaliste afin de valoriser du capital ( « la forme universelle de tout procès de production capitaliste »9) et la subsomption réelle. La subsomption réelle du travail par le capital signifie la modification du mode réel de travail, qui se manifeste par une socialisation croissante du travail par le moyen de la coopération, la concentration des capitaux (capital fixe et capital variable) entre des mains de plus en plus restreintes, l’intensification du travail, etc. Cette transformation de la forme que prend le travail est nécessaire aux capitalistes pour extraire davantage de survaleur relative. La subsomption réelle du travail est donc liée à la production de survaleur relative, là où la subsomption formelle est liée à la production de survaleur absolue.

« De même qu’on peut considérer la production de la survaleur absolue comme l’expression matérielle de la subsomption formelle du travail sous le capital, on peut tout autant considérer la production de la survaleur relative comme celle de la subsomption réelle du travail sous le capital »10

Concrètement, cette subsomption réelle a entraîné dans les pays qui ont légalisé le proxénétisme et réglementé la prostitution la structuration de mégabordels nommés Freikörperkultur(FKK)-Saunaclubs11, de chaînes de maisons closes, la disparition des petits lupanars ou encore une ubérisation de la prostitution : les personnes prostituées qui étaient salariées des bordels sont transformées en « clientes » car considérées comme « auto-entrepreneuses ». Elles louent une chambre du bordel, payent pour les annonces qu’il publie et les autres services qu’il offre à des prix excessifs (coiffure, manucure, produits de beauté, etc.). Sans lien de subordination salariale apparent, les propriétaires des bordels peuvent se débarrasser facilement des personnes prostituées dont ils ne veulent plus. Par exemple, durant la pandémie de coronavirus, les propriétaires de bordels en Espagne ont jeté à la rue nombre de femmes prostituées puisqu’elles n’avaient pas le statut d’employées12.

L’interview d’un patron allemand nommé Jürgen Rudloff dans Les Echos13, propriétaire de la chaîne de bordels Paradise, est assez révélateur de ce qu’est la prostitution une fois subsumée par le capital. Depuis la réglementation de la prostitution en 2002 et la légalisation du proxénétisme, « il n’y a jamais eu autant d’investissements dans cette branche », se félicite le magnat de la prostitution. Selon des estimations du Statistiches Bundesamt, l’équivalent allemand de l’Insee, la prostitution totaliserait un chiffre d’affaires annuel proche de 15 milliards d’euros en Allemagne, devenue « le bordel de l’Europe » avec plus de 400 000 prostitué.e.s. Son bordel de Leinfelden-Echterdingen accueille environ 300 clients par jour pour 60 à 90 prostituées ubérisées, « dont les trois quarts sont originaires d’Europe de l’Est, déboursent elles aussi 79 euros à la porte. Elles facturent ensuite leurs services directement au client et versent un impôt forfaitaire de 25 euros au Paradise, qui le transfère au fisc allemand, comme le prévoit la loi. Celles qui restent dormir dans les dortoirs de deux à six lits payent encore 23 euros par nuitée. ».

Le Paradise revendique un chiffre d’affaires annuel de 6 millions d’euros et une marge de 15 %, de quoi motiver les capitalistes à faire commerce du corps des femmes légalement (85 à 96 % des personnes prostituées en France sont des femmes14).

Une politique de légalisation et de réglementation qui n’a pas réussi à améliorer les conditions d’activité des personnes prostituées ni à encadrer correctement cette activité, comme l’indique Ursula Matschke dans l’article précédemment cité des Echos, conseillère municipale en charge de l’égalité des chances à Stuttgart. Cette dernière souligne en effet qu’à Stuttgart, 1 500 prostituées travaillent légalement et 3 000 illégalement. La prostitution de rue organisée par des réseaux de proxénètes n’a pas disparu avec la légalisation, c’est même l’inverse. L’ouverture du marché du travail aux Bulgares et aux Roumaines en 2014 a fait affluer des milliers de jeunes femmes pleines d’illusions, dépendantes et démunies, ce qui a bien entendu stimulé la traite des femmes en Europe (85 % des personnes prostituées allemandes sont d’origine étrangère, et 75 % d’entre elles viennent d’un pays européen, principalement la Roumanie et la Bulgarie)15. Cette arrivée massive de prostituées étrangères a eu pour conséquence de faire baisser les prix : si les femmes du Paradise facturent la passe à 50 euros en moyenne pour une demi-heure, celles du centre-ville qui exerce illégalement la proposent pour 20 euros environ, précise l’article des Echos.

Enfin, la condamnation du patron Jürgen Rudloff à 5 ans de prison pour complicité de traite d’êtres humains, prostitution forcée et fraude en 2019 (Rudloff a avoué que des gangs criminels, en particulier les Hell’s Angels et les United Tribuns, étaient impliqués dans le fonctionnement des établissements de la chaîne, en particulier dans le recrutement des victimes)16 prouve que réglementation et la légalisation n’entraînent pas une amélioration des conditions d’activité des personnes prostituées, ce qui représentait pourtant l’argument phare des réglementaristes allemands : la loi de 200217 devait, d’après eux, améliorer les conditions d’activité des personnes prostituées en leur fournissant des contrats de travail et un accès aux soins. Sauf que les personnes prostituées ne sont pas, dans les faits, déclarées comme salariées, mais comme auto-entrepreneuses, ce qui résulte de l’ubérisation de la prostitution. Elles n’ont donc pas accès à la couverture sociale dont disposent les autres salariés allemands.

Les militants communistes ne doivent pas lutter pour une amélioration des conditions d’activité des personnes prostituées. La prostitution est en soi une violence, une exploitation.

C’est une exploitation qui touche essentiellement les femmes, notamment les minorités de femmes les plus précaires et les plus vulnérables. En France, 85 % des prostituées sont des femmes immigrées venant surtout de Roumanie, de Bulgarie ou du Nigéria. Une enquête réalisée à Vancouver a montré que 50 % des prostituées canadiennes étaient d’origine indienne, alors que la communauté indienne ne représente que 3 % de la population du Canada. En Inde, les prostituées sont issues de la caste des intouchables – le groupe le plus bas dans l’échelle sociale selon les critères locaux, et le plus méprisé18. Des chiffres qui font écho à ceux cités précédemment au sujet des personnes prostituées en Allemagne, et qui s’ajoutent au fait que 30 % des prostituées allemandes ont moins de 21 ans19. L’accroissement de la prostitution résulte de la paupérisation croissante du prolétariat mondial et de la féminisation de la pauvreté, elle est la production d’un système économique qui condamne les trois-quarts de la population mondiale à la misère.

D’après Ingeborg Kraus, psychologue et psychothérapeute auprès de femmes prostituées en Allemagne, 65 % d’entre elles ont subi des violences physiques, et 50 % des abus sexuels. Selon une enquête réalisée en 2008 en Allemagne auprès de 110 femmes prostituées, 26 % étaient porteuses de maladies sexuellement transmissibles, et 42 % présentaient de fortes infections20.

La violence dans la prostitution ne s’arrête pas là : la prostitution entraîne de graves troubles psychotraumatiques. Entre 68 % à 80 % des personnes prostituées souffrent d’un état de stress post-traumatique, accompagné de troubles de la personnalité très importants21 : dissociation psychique entre la personne prostituée et sa personnalité « privée » et dissociation physique avec des troubles de la sensibilité corporelle et sensorielle (aussi nommé décorporalisation22), hypersthésie, anesthésie, seuil de tolérance à la douleur élevé Enfin, plus qu’un simple discours ayant pour vocation de normaliser la prostitution, la séparation entre le « Moi » et le corps peut également représenter une méthode de survie pour les personnes prostituées qui a des conséquences psychologiques importantes.

Cette violence intrinsèque à l’activité de prostitution (due à la marchandisation du corps des personnes prostituées et à la répétition de rapports sexuels non désirés) ne saurait disparaître avec la réglementation de cette activité, car elle est de portée ontologique, elle correspond à la substance de l’activité prostitutionnelle.

Pour ce qui est de la violence strictement physique énoncée un peu plus haut, elle ne disparaîtra pas avec la réglementation, elle changera tout au plus de forme. La nécessité pour les capitalistes qui ont investi dans la prostitution d’augmenter leurs profits et de gagner des parts de marchés face à leurs concurrents les pousse à diversifier les « services sexuels » proposés par leurs établissements, des « services » de plus en plus violents suivant la diversification des contenus et des tendances pornographiques (BDSM, sodomie, gang bang, douche dorée, etc.). Les personnes prostituées n’ont pour la plupart pas d’autre choix que d’accepter ces pratiques sexuelles, car en cas de refus, les propriétaires des bordels peuvent tout à fait décider de se séparer d’elles pour en choisir d’autres qui acceptent de réaliser ce genre de « services ».

Avec la nécessité pour les capitalistes de gagner de nouvelles parts de marché face à leurs concurrents s’ajoute la nécessité pour eux d’agrandir le marché prostitutionnel. Ainsi, la réglementation de la prostitution entraîne une augmentation du nombre de femmes prostituées : 400 000 femmes prostituées en Allemagne23, 200 000 à 400 000 en Espagne24 contre 30 000 en France25 ; mais aussi une augmentation du nombre de clients, conséquence de la banalisation de la prostitution dans les sociétés réglementaristes. En Allemagne, 1,2 millions de clients payent des prostituées quotidiennement (pour une population de 80 millions de personnes). En Espagne, 39 % des hommes ont déjà été clients auprès de personnes prostituées, 73 % en Thaïlande contre 12,7 % en France26.

La normalisation de la prostitution dans les sociétés réglementaristes est la condition sine qua non à l’élargissement du marché prostitutionnel. À l’image de ce que font les autres industries pour développer leurs marchés économiques, l’industrie du sexe use massivement de la publicité : campagnes d’affichage dans les villes, émissions télévisées telles que “Exklusiv – die Reportage. Deutsche Bordelle in Not – Rotlicht-Experten im Einsatz” sur RTL2 (sur le modèle de cauchemar en cuisine, des experts de l’industrie du sexe viennent sauver des bordels en faillites)27.

Ces campagnes publicitaires permettent de normaliser la prostitution, mais aussi de créer de nouveaux clients en suscitant du désir chez les hommes envers les femmes prostituées. Comme l’indique Michel Clouscard : « le désir est cette forme produite par les rapports de classes qui désigne, qui donne sens et réalité à son objet »28. Le désir d’avoir un rapport sexuel tarifé avec une personne prostituée n’est pas inné ni propre à certains individus, c’est au contraire un phénomène social.

« Cette mise au point à propos de la nature du désir, lequel, donc, n’est pas étymologique (c’est le besoin sexuel qui est originel), mais forme culturelle productrice de la valeur d’échange de son objet (corollaire de la forme marchande), est nécessaire pour comprendre cette notion clé de mondain, de pouvoir de classe sur le sexe, pour écarter les réductions psychanalytiques du sexe, pour écarter les régressions pré-kantiennes à la Deleuze & Co »29

Ainsi, la prostitution n’a pas de valeur en elle-même, un acte sexuel ne peut devenir une marchandise que dans certaines conditions historiques et sociales déterminées. C’est parce qu’une société accepte de considérer le corps humain comme quelque chose pouvant être réifié et marchandé que la prostitution peut devenir une source de revenu. Et cette acceptation par une société humaine de la prostitution est le résultat d’une lutte entre différentes classes sociales et groupes sociaux.

Aujourd’hui, seule la bourgeoisie a intérêt à ce que la prostitution se développe, car elle représente une manne économique importante à exploiter. Cet engouement pour la prostitution au sein de la bourgeoisie touche aussi bien ses franges aux vernis progressistes que ses franges les plus réactionnaires, comme l’illustre Le manifeste des 343 salauds signé entre autre par Ivan Rioufol et Eric Zemmour, et qui s’opposait à la loi sur la pénalisation des clients entrée en vigueur en 2016. Ce ralliement autour de la défense de la prostitution 30 est un très bon exemple de ce que Michel Clouscard nommait le libéralisme-libertaire. La normalisation de cette exploitation dans les sociétés capitalistes illustrée par la propagation des conceptions néo-réglementaristes est le fruit de l’hégémonie économique, culturelle et politique de la bourgeoisie.

Cette normalisation de la prostitution induit nécessairement une prostitutionnalisation du tissu social. Les rapports entre les femmes et les hommes sont directement influencés par la banalisation de la prostitution et par la structuration du désir et de ses représentations dans les rapports hétérosexuels. Laisser aux hommes un libre accès aux corps et à la sexualité des femmes en échange d’argent a des conséquences idéologiques et matérielles à la fois pour les hommes et pour les femmes. Normaliser la prostitution, c’est normaliser le fait qu’une partie de la population (essentiellement féminine puisque 80 % des personnes prostituées dépendantes d’un proxénète sont des femmes ou des fillettes dans le monde 31) soit condamnée à assouvir les désirs sexuels d’une autre partie de la population (essentiellement masculine). La prostitution participe à la culture du viol en diffusant la fausse idée qu’un consentement sexuel peut s’acheter. Elle consolide aussi les stéréotypes de genre et l’hypersexualisation des femmes. Légitimer et régulariser cette exploitation ne peut qu’accentuer l’oppression de toutes les femmes et renforcer le patriarcat compris comme une idéologie discriminatoire se basant sur les différences biologiques (maternité, règles, différence morphologiques) entre hommes et femmes pour imposer la primauté de l’autorité masculine32.

La prostitution peut finalement être ramenée à une double oppression : économique et idéologique. Économique, car 9 personnes prostituées sur 10 dans le monde dépendent d’un proxénète 33. Qu’elle soit légale ou non, la prostitution est l’exploitation d’êtres humains par d’autres afin de réaliser du profit. Idéologique, car la prostitution renforce le patriarcat et l’oppression des femmes.

Pour conclure cette partie de l’analyse, nous reprendrons l’analogie faite par les camarades d’Iniciativa Comunista lors de la Conférence des Femmes de 2018 :

« La double oppression – économique et idéologique – de la prostitution peut être vue dans la relation, d’une part, du proxénète, qui incarne la relation de pouvoir économique et d’exploitation, et d’autre part, celle du consommateur, le client, qui incarne la relation de pouvoir patriarcale. »34

 

 

  1. Richard Poulin, Abolir la prostitution, manifeste, M éditeur
  2. Kajsa Ekis Ekman, L’être et la marchandise, prostitution, maternité de substitution et dissociation de soi, M éditeur
  3. 38 % sont originaires d’Afrique, 12,5 % de Chine et 40 % des pays de l’Est, https://www.cairn.info/revue-ballast-2015-1-page-64.htm#re17no17
  4. https://www.cairn.info/revue-ballast-2015-1-page-64.htm#re17no17
  5. Rapport de la Fondation Scelles, 2012
  6. https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/synthese_rapport_sur_la_prostitution_des_mineurs_12072021.pdf
  7. Ce « syndicat » est signataire de la charte du Global Network of Sex Work Project (NSWP), lobby mondial en faveur du système prostitutionnel. La charte du NSWP prévoit d’inclure à la fois les femmes prostituées, les « intermédiaires » et les « managers » (autrement dit des proxénètes) sous le vocable de « travailleurs du sexe ».
  8. K. Marx, Manuscrits de 1863-1867, texte trouvable sous le nom de « subsomption formelle, subsomption réelle », texte 50, dans K. Marx, Écrits Philosophiques, édition de Lucien Sève, Gallimard Flammarion
  9. Ibid
  10. Ibid
  11. Exemple de mégabordel : le Pascha est un bordel de 9 000 mètres carrés de 12 étages à Cologne, en Allemagne. Avec environ 120 prostituées, plus de 80 employés de soutien et jusqu’à 1000 clients par jour, c’est le plus grand bordel du monde.
  12. https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/coronavirus-prostituees-du-paradise-jonquera-jetees-rue-1810774.html
  13. https://www.lesechos.fr/weekend/business-story/jurgen-le-roi-des-maisons-closes-en-allemagne-1211343
  14. https://arretonslesviolences.gouv.fr/sites/default/files/2020-04/Document%2010.pdf
  15. https://fondationscelles.org/pdf/RM4/Allemagne_fr.pdf
  16. https://fondationscelles.org/fr/fr/actualites/264-condamnation-de-jurgen-rudloff-la-fin-du-paradis
  17. https://blogs.mediapart.fr/belladonne/blog/151015/nouvelle-loi-allemande-sur-la-prostitution
  18. https://www.humanite.fr/social-eco/droits-des-femmes/prostitution-la-marchandise-femme-est-exploitee-par-le-capitalisme-le
  19. Ibid
  20. Ibid
  21. https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/doc_violences_sex/2014-diaporama-Prostitution-colloque-de-Munich.pdf
  22. https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/doc_violences_sex/these_sur_la_decorporalisation_dans_la_pratique-prostitutionnelle-Judith_Trinquart.pdf
  23. https://www.pressegauche.org/L-Allemagne-est-le-bordel-de-l-Europe-On-estime-que-1-2-million-d-hommes-y#:~:text=La%20l%C3%A9galisation%20a%20contribu%C3%A9%20%C3%A0,des%20services%20sexuels%20chaque%20jour.
  24. http://fondationscelles.org/pdf/RM5/ESPAGNE_extrait_5eme_rapport_mondial_Fondation_Scelles_2019.pdf
  25. https://arretonslesviolences.gouv.fr/sites/default/files/2020-04/Document%2010.pdf
  26. https://mouvementdunid.org/prostitution-societe/dossiers/combien-d-hommes-prostitueurs/#:~:text=L’enqu%C3%AAte%20fran%C3%A7aise%20men%C3%A9e%20aupr%C3%A8s,hommes%20disant%20%C3%AAtre%20%C2%AB%20clients%20%C2%BB.
  27. https://fondationscelles.org/pdf/RM4/Allemagne_fr.pdf et https://www.tvtoday.de/tv/kritik/tatort-fernsehgeraet-die-rtl2-puffprofis_4331270.html
  28. Michel Clouscard, Néo-fascisme et idéologie du désir, éditions Delga, p. 94
  29. Ibid, p. 95
  30. https://www.monde-diplomatique.fr/2014/09/CHOLLET/50782
  31. Rapport mondial sur l’exploitation sexuelle, éditions Economica, janvier 2012
  32. https://www.reconstruction-communiste.fr/le-feminisme-rc/
  33. Rapport mondial sur l’exploitation sexuelle, éditions Economica, janvier 2012
  34. https://www.bibliomarxiste.net/documents/espagne/prostitution-et-lutte-des-classes/